Bonjour tout le monde !

Je crains bien qu'il ne nous reste bientôt que le téléphone et Internet pour communiquer.

Mon département vient d'être placé en vigilance de je sais plus quel rouge, nous sommes sous le régime du couvre-feu, encore un vocabulaire pas très heureux. "Confinement nocturne", on aurait compris, non ? Nous sommes certes en guerre, mais contre un virus, pas en guerre avec des armes. Pourquoi les Hautes-Pyrénées et pas la Gironde ? Pourquoi les girondins (qui ont beaucoup plus d'étudiants-fêtards que nous) ont-ils le droit de venir chez nous ?

Nous devions aller en Gironde faire le tour de la famille mais, raisonnables, nous allons rester à l'abri. Ma petite-fille infirmière vient de partir à Lyon pour deux semaines, car la réserve sanitaire a lancé un appel à l'aide.

L'actualité va trop vite, je n'arrive pas à suivre.

Il y a quelques semaines il y a eu une catastrophe dans les vallées de la Roya, de la Vésubie et de la Tinée.. Je pense sans cesse à ces pauvres gens. Je n'ai pas oublié la crue qui nous a frappés en juin 2013. Mêmes images, même désolation. Sept ans après, nous en voyons encore les traces. Je vous la raconterai un peu mieux dans quelque temps. Cela avait commencé en février. Il avait tant et tant neigé que l'énorme masse blanche qui se trouvait sur le Capet (dire "capétt), juste au dessus du village, risquait de provoquer une super avalanche. Notre maison n'était pas sur la trajectoire, mais le souffle seul pouvait causer des dégâts.

Vous voyez le point blanc, tout en haut : c'est un hélicoptère qui surveillait l'état de la montagne.

Devinez ce qui nous est arrivé ! On est (gendarmes, pompiers, armée, je ne me souviens plus, ils sont tous passés voir si tout allait bien) venu nous porter un beau papier édité par la Mairie : un arrêté municipal de confinement ! ! ! Personne ne savait que cela pouvait exister. Habitants confinés, et tous les touristes évacués, et en février il y en a quelques centaines chez nous. Nous avons passé plusieurs jours volets fermés. 

Les pompiers ont élargi le passage contre la maison de Voisine :

 Il n'y a pas eu d'avalanche, les mois ont passé, on se croyait tranquilles. Le printemps a été très froid, l'hiver nous semblait éternel, et juin fatal est arrivé. En quelques jours le temps s'est énormément radouci, il s'est mis à pleuvoir, le stock de neige de l'hiver s'est mis à fondre, fondre... et le torrent a grossi, grossi, et ce fut la catastrophe.

On a dû évacuer touristes (beaucoup de curistes en juin) et habitants. Quelle épopée !  Les chiens, les chats, les vieux. On était tous complètement abasourdis par ce qui nous arrivait.

J'ai juste deux ou trois photos de ces heures pourtant étranges. Nous étions bloqués dans un restaurant d'altitude, coincés entre une partie de route qui risquait s'effondrer en aval, et l'autre qui était encore sous la neige, et où les gars de la DDT n'arrivaient à dégager toute la neige accumulée. Je regrettais d'être partie sans provisions ni couvertures, car j'ai bien cru que nous allions y passer la nuit.

Nous avons eu la chance de pouvoir revenir chez nous moins d'une semaine plus tard. Mais, notre vallée étant envahie par des hordes de curieux indésirables, on nous a fait des laisser-passer nous permettant de franchir le Tourmalet, qui était le seul accès praticable. Il fallait montrer le fameux document et nos cartes d'identité aux CRS (ou gendarmes ?) qui étaient en faction là-haut, à 2115 mètres.

Nous qui sommes du baby-boom, donc nés en temps de paix, voilà deux fois qu'on vit confinement et restrictions de circulation.